Cortex auditif : physiologie

Conception :
Avec la participation de : Rémy Pujol

Les caractéristiques anatomo-fonctionnelles du cortex auditif humain se révèlent chaque jour plus complexes. En fait, de nombreuses questions se posent toujours sur les processus d'intégration de l'information auditive effectués à ce niveau.

Historique

Les premières études qui ont reliée la structure et la fonction du cortex cérébral du lobe temporal avec la perception auditive et de la parole ont été menées par Paul Broca (1824-1880) et Carl Wernicke (1848-1904). La description de l'aphasie de Broca (lésion dans les aires 44 et 45 de Brodman, dite de Broca, produit une perturbation de l'articulation de la parole) et de l'aphasie de Wernicke (lésion dans l'aire 22 de Brodmann, qui représente la perturbation de la perception de la parole) ont permit la localisation dans le cortex cérébral des processus de base de l'ouïe et de la parole.

Fonctionnement du cortex auditif

Classiquement on peut définir deux régions fonctionnelles dans le cortex auditif :

  • - L'aire auditive primaire AI est formée par les neurones décodant la représentation spatiale du stimulus : cochléotopique et tonotopique. 
  • - L'aire auditive secondaire AII, n'a pas une claire organisation tonotopique, mais son rôle fonctionnel est très important pour la localisation spatiale du son, l'analyse des sons complexes : en particulier pour les vocalisations spécifiques des espèces animales et pour le langage humain. Elle est aussi impliquée dans la mémoire auditive.
  • - La région entourant périphériquement ces deux zones AI et AII, est dédiée à l'intégration de l'audition avec les autres systèmes sensoriels.

Fonctionnement de l'aire auditive primaire

Dans l'aire AI, les neurones sont "en syntonie" pour une fréquence donnée et disposés selon des bandes d'isofréquences organisées tonotopiquement (A, AI, P, VP). La distribution spatiale très précise de ces bandes peut définir une carte du récepteur auditif. Leur activité dépend des caractéristiques du stimulus : fréquence, intensité et position de la source dans l'espace. L'activité fonctionnelle de cette région est fortement influencée par l'état d'éveil ou sommeil du sujet. Certains neurones très spécifiques participent aussi à l'analyse des sons complexes.

De nouvelles techniques pour étudier le cortex cérébral (IRMf, PET et MEG) indiquent que la distribution des fréquences observée chez les animaux, avec des techniques différentes, ne correspond pas exactement à celle des humains, bien qu'il y a de bandes d'isofréquences. Par exemple, lorsque qu'on étudié avec la magnétoencéphalographie (MEG) l'activation corticale avec de sons purs (ci-dessous). IRMf chez l'homme suggère que les basses fréquences sont situées dans la région postéro-latérale et superficielle dans la fissure de Sylvius, tandis que les fréquences aiguës sont situées dans la région antéro-médiane et plus profondes. Cependant, il existe une certaine variation entre les individus.

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Magnéto-encéphalographie (MEG) : localisation des sons purs chez le sujet normo-entendant

Localisation des sons purs (500, 1000, 2000, 4000 Hz) sur le plan frontal (A) et latéral (B) du cerveau.
Images P. Gil-Loyzaga, Centre MEG de l'Université Complutense (Madrid).

Intégration temporelle des stimulations auditives

Les hommes, comme les autres animaux, sont capables, à l'état d'éveil, de percevoir les petites variations temporelles des sons complexes. Ces petites variations sont essentielles à la compréhension du langage humain.
Plusieurs études du cortex auditif primaire ont identifié, chez les primates éveillés, deux populations de neurones synchronisés et non-synchronisés qui codent différemment les stimulus séquentiels.

  • Les neurones synchronisés analysent les changements temporels plutôt lents. Ils répondent précisément aux trains d'influx de très peu de stimulations (A1), mais sont incapables de maintenir leur activité si le nombre de stimulus augmente. Les changements rapides de rhytme sont perçus par ces neurones comme une tonalité continue. Ces neurones participent dans l'analyse de la fréquence et de l'intensité.
  • Les neurones non-synchronisés analysent des changements temporels rapides (de nombreuses stimulationsi). Ils distinguent parfaitement les variations temporelles courtes, et sont capables de distinguer correctement un stimulus du suivant.

Cette division fonctionnelle du cortex auditif permet de traiter les variations temporelles des signaux avec une fidélité beaucoup plus grande que dans d'autres centres de la voie auditive.  Elle permet d'obtenir plus de renseignements sur les sons complexes, la localisation de la source sonore et son mouvement.

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Neurones synchronisés et non-synchronisés

  • Les neurones synchronisés répondent toujours à chaque signal (clic) lorsque les trains de stimulus ont un intervalle supérieur à 20 ms (A1). Si cet intervalle est inférieur à 20 ms, c'est à dire si on augmente le répétition de la stimulation, les neurones désynchronisent leurs fréquence de décharge. Lorsque l'intervalle est inférieur à 10 ms (B1) ces neurones répondent uniquement au début et à la fin du train de stimuli.
  • Les neurones non-synchronisés ne répondent pas d'une façon synchrone aux stimulations (A2 et B2), mais leur activité augmente progressivement jusqu'a une décharge à très haute fréquence (B2).

Intégration spectrale des stimulations auditives

Les vocalisations animales et le langage humain varient largement entre les individus et même dans chaque individu ils existent des variations, volontaires et involontaires. Bien que la perception des messages sonores nécessite une analyse des fréquences composant un son complexe, ce qui est encore plus important c'est l'analyse du spectre sonore.
Si on conserve le spectre contenant tout le profil des ondes sonores d'un son complexe (enveloppe d'onde), même en omettant certaines fréquences spécifiques, il est possible de préserver une bonne audition et la compréhension des phonèmes.
Pour ces études, la MEG, non invasive, permet localiser à la surface du cerveau, et avec une haute précision spatiale, les activités évoquées qui ont lieu en quelques millisecondes. C'est une technique appropriée pour l'étude des fonctions auditives complexes (par exemple, de la parole) et le niveau cortical de pathologies.

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MEG chez le sujet normal (A) y dyslexique (B)

Chez les individus normo-entendants (A) l'activité linguistique corticale se trouve, en majorité, dans le cortex gauche avec des activités spécifiques, Chez le dyslexique (B), l'activité est plus diffuse et dominante dans le cortex droit.

Image P. Gil-Loyzaga, Centre MEG de l'Université Complutense (Madrid)

Dernière mise à jour : 12/09/2016 11:44